1774-02-26, de Marchesa Viale à Voltaire [François Marie Arouet].

Après la lettre que j’ai eu l’honneur de vous écrire, monsieur, où vous avez pu connaître avec beaucoup de facilité tous les sentiments d’estime et d’admiration que vous m’inspirez, j’espérais que vous auriez pris quelque confiance en moi, et qu’il était impossible de pouvoir douter que je négligeasse l’occasion qui se présente de vous obliger en quelque chose.
Je crois, monsieur, que vous aurez déjà appris que vos protégés seront entièrement satisfaits; mon mari, malgré de fâcheuses circonstances, ne veut point les faire attendre, il a donné des ordres pour que l’on payât tout ce qui peut manquer de leurs effets &ca.

Je m’estimerais fort heureuse, monsieur, s’il était en mon pouvoir de vous servir en quelque chose de plus d’importance. Malgré mon aversion pour les affaires, surtout en matière de commerce, je me suis mêlée avec plaisir de celleci, uniquement parce qu’elle vous intéressait.

Mon mari qui est présentement à Rome, m’écrit qu’il veut prendre la liberté de vous envoyer une rareté de cette ville; je le trouve bien hardi, ne sachant ce qui est digne de vous être présenté, car je suppose qu’il n’a intention de vous envoyer des indulgences; quoiqu’il en soit, daignez l’excuser en faveur de l’intention; je sais qu’il vous admire autant que moi, s’il est possible. Recevez encore mes vœux les plus sincères Monsieur, que je forme pour votre conservation, et croyez que je suis à jamais votre plus grande admiratrice et très obéissante servante.

la marquise Viale