1772-11-04, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jean François Marmontel.

Je vous envoie, mon cher ami, cette épître à Horace, tout informe qu’elle est.
Elle sera pour vous et pour nos amis. Je suis forcé à la laisser courir parce que je sais qu’on en a dans Paris des copies très incorrectes. Je tire dumoins de ce petit malheur un très grand avantage en vous soumettant cette esquisse. Les ennemis d’Horace et les jansénistes crieront, peu de gens seront contens. La seule chose qui me console c’est que la fin de l’épitre est si insolente qu’on ne l’imprimera pas.

J’ai lu Romeo; je sais qu’il a réussi au théâtre, et que Cléopatre est tombée, mais je vous avertis qu’il y a trente morceaux dans vôtre Cléopatre qui valent mieux que trente pièces qui ont eu du succez. Il me semble que le public ne sait plus où il en est. J’avouerai que je ne sais guères plus où j’en suis. Il est trop ridicule de faire de ces pauvretés là à mon âge; j’en rougis. C’est barbouiller le buste que vous et la grande prêtresse avez si merveilleusement décoré.

La copie que je vous envoie est aussi pour mr Dalembert. N’at’il pas us copiste?