30e 8bre 1772, à Ferney
Oui, Madame, j’ai osé écrire à Horace, et je n’ose vous envoier mon épitre.
La raison en est qu’elle n’est point finie. Ce n’est qu’une esquisse sur laquelle j’ai consulté Mr D’Argental car il faut toujours consulter dans les choses même où l’on croit avoir raison. Je devrais vous consulter plus que personne, mais vous m’intimideriez par ces trois lignes que je trouve dans vôtre Lettre, les voicy.
‘Non pas quelques morceaux qui les contrarient et qui ont paru sous vôtre nom que je suis persuadée qu’on vous a prêtés, et que vous désavouerez quelque jour. Je crois que l’on blasphème lorsqu’on assure que vous avez heurté par distraction des vérités, des maximes que vous avez enseignées etc.’.
Vous m’avouerez, Madame, que pour m’inspirer une pleine confiance, vous devriez bien commencer par me confier ces accusations terribles dont je ne me sens point du tout coupable. Il faut dans les traittés que la bonne foi soit réciproque. Dites moi hardiment ce que vous avez sur le cœur et je vous répondrai de même. Si je suis assez téméraire pour n’être pas de vôtre avis, ce sera en vous estimant et en vous respectant de toute mon âme. Il y a longtems que ces sentiments sont gravés dans mon cœur, et rien ne les effacera. J’en dis autant à Monsieur le Président de Meyniere.
Le vieux malade de Ferney