1765-10-12, de Voltaire [François Marie Arouet] à François Achard Joumard Tison, marquis d'Argence.

Vraiment, Monsieur, je croiais vous avoir envoié la Lettre que vous me demandez; la voicy, quoi qu'elle n'en vaille pas trop la peine.
Je suis toujours très étonné que le parlement de Toulouse soit demeuré dans cette affaire, dans une inaction qui ne peut être que honteuse. S'il croit avoir bien jugé les Calas il doit publier la procédure pour tâcher de se justifier. S'il sent qu'il se soit trompé il doit réparer son injustice ou du moins son erreur. Il n'a fait ni l'un ni l'autre, et voilà le cas où c'est le plus infâme des partis de n'en prendre aucun.

On me mande de Languedoc que cette fatale avanture a fait beaucoup de bien à ces pauvres huguenots, et que depuis ce temps là on n'a envoié personne aux galères pour avoir prié Dieu en pleine campagne en vers français aussi mauvais que nos pseaumes latins.

Adieu, Monsieur, vous ne sauriez croire combien je suis sensible au bien que vous faittes dans vôtre province.

Mille respects à mlle vôtre fille qui sera bientôt madame.