au Château de Ferney 20e 9bre 1763
Madame,
Un vieux solitaire prèsque réduit au sort de Tyrésie et d'Homère, et prèsque entièrement aveugle comme eux, sans avoir vu ni chanté comme eux les secrets des dieux, met aux pieds de Vôtre Altesse sérénissime, ce petit ouvrage qui n'est point encor public.
On doit des prémices à un esprit aussi juste, aussi éclairé et aussi naturel que le vôtre. On les doit, surtout, à la protectrice des infortunés Calas, et à celle qui aime la Tolérance et la vérité. Vôtre suffrage Madame, sera la plus belle récompense de ce travail.
Que Vôtre Altesse Sérénissime daigne agréer mes souhaits pour vôtre prospérité, et pour celle de toute vôtre auguste famille. Que la grande maitresse des cœurs veuille bien ne pas oublier. J'ose me flatter que cet éssai sur la Tolérance ne déplaira pas à sa belle âme. Il faut bien, sans doute, que la tolérance soit bonne à quelque chose, puisque la persécution n'a rempli la terre que d'hypocrisie, d'horreur et de carnage.
Je suis avec un profond respect
Madame
De Vôtre Altesse Sérénissime
Le très humble et très obéissant serviteur
Voltaire