Vous qui aimés tant l'humanité, Vous entendrés avec plaisir Monsieur la bone nouvelle de la paix entre l'impératrice, la Saxe et le Roi de Prusse.
Les articles définitifs ont été signés et publiés le 15 du courant à Hubertsbourg. Le Roi nous a témoignés une bonté et faveur distingués, nous ayant fait anoncer cet heureu événement par un Courier précédé d'une quantité de postillons. Nous n'avions rien de plus pressés en aprenant cette agréable et grande nouvelle que de nous rendre tout de suite à l'église, de nous prostenner devant l'être Suprême et de prouver ainsi devant tout le monde notre joye et notre reconoissance de ce bienfait signalé de la Divine Providence. Le soir notre jeunesse a célébré ce grand jour par un bal. Plus nous avions besoin de cette paix et plus aussi notre joye a été parfaite. Je ne me souviens pas d'un événement qui m'aye transportée et remuée à ce point. J'ai d'abord pensée à Vous Monsieur et je me fais un plaisir singulier de Vous mander cette délicieuse nouvelle. J'ose me flatter que Vous voudrés bien partager notre satisfaction. Le Roi recouvre par ce traité toutes les Provinces qu'il possédoit avant cette funeste guerre et la base de ce traité sont ceux de Breslau et de Dresden tous favorables à ce Monarque. Les Siècles futurs auront peine à croire coment un petit Royaume come celui de Prusse a pus résister à tant d'enemis redoutables. Chacune de ces puissances enemies étant supérieure en resources d'argent et d'homes, à celle qui devoit selon toute probabilité être subjuguée, renversée, terassée, et c'est néamoins le Roi de Prusse qui se tire d'affaire le plus glorieusement du monde sans perdre un pousse de terre. Cela ne s'apelle t'il pas un miracle? Mais il falloit aussi une tête come la siene, un génie et un héroisme audessus de tout ce que nous conoissons et admirons dans l'histoire. Ce Siècle merveilleu mérite bien de porter son nom. Vous devriés chanter sa louange, il n'y a que Vous Monsieur capable de l'encencer, de parler de ses exploits et de marcher avec lui à l'imortalité. Je suis enchanté je l'avoue de cette paix qui me fait presque oublier tous nos maux passés, et quoi que nous nous ressentironts longues anées de cette funeste guerre nous nous consolerons volontier par l'avantage qui en résulte à toute notre espèce par la cessation des calamités. Je ne puis parler aujourd'huy d'autre chose que de cet heureu événement. J'espère que notre corespondance devenant plus libre sera aussi plus exacte à l'avenir. Du moins j'ose Vous assurer Monsieur que le nombre de Vos charmentes lettres augmentera certainement ma satisfaction et ma reconoissance. Conservés moi Votre prétieuse amitié et croyés moi sans fin Votre amie et servante
LD
Ce 19 février 1763