à Paris 9 août 1760
J'ai eu l'honneur de recevoir madame la lettre que vous avez bien voulu m'écrire.
Permetez moy de vous parler aussy pour mr Alethof avant moy, la politesse française l'exige et j'ai vécû assez avec cette nation pour l'avoir su imiter au moins en cela. Mr Alethoff est premièrement très confus des remerciments que vous luy faites pour une chose qui n'en vaut pas la peine et qui vous est même inutile. Il l'a vu depuis par vos loix somptuaires qu'il a lu. Il les admire, voit qu'elles ont été dicté par la sagesse, et désirerait fort qu'on les immitât dans son pays. On aurait les épaules moins chargé d'or et d'argent, dit il, mais on en aurait davantage dans la poche. Dans ce moment cy il est très fâché qu'elles existent à Geneve. Il ne vous oubliera jamais madame et fut il dans le fond du Camchatka où il n'a auqune envie d'aller il ne cultiverait pas moins votre corespondance.
Permetez que je parle actuelement pour moy. J'ai sçû que les jours du pet n'avoit pas plus existé que cent mille chose dont on parle dans Paris que persone n'a vu et qu'on oublie le lendemain, mais come on prêtait cete pièce à mr De Voltaire il est tout naturel qu'on en ait parlé plus longtemps. Beaucoup de gens m'ont dit même l'avoir vu car il serait humiliant en cas que la pièce eût existé à être le dernier à l'anoncer et à en dire son sentiment.
A l'égard des oeuvres de l'abé de St Piere je croyés qu'on en donnait une édition complète car pour un réimpression d'un de ces ouvrages […]. Je les ait tous. Je vous prie d'assurer mr De Voltaire de mon respect et de me croire avec respect
madame
Votre très humble serviteur.