au château de Ferney par Genève 20 décembre 1760
Monsieur,
Je vous souhaitte la bonne année.
Votre pauvre secrétaire n'a plus que cela à faire. Votre Excellence m'a cassé aux gages. Il y a un siècle que je n'ay eu de vos nouvelles, et je suis toujours dans ma profonde ignorance touchant les paquets que j'ay eu l'honneur de vous envoier. Le gentilhomme qui devait venir de Vienne à Geneve est apparemment amoureux de quelque Allemande. Nuls papiers, nulle instruction pour achever votre histoire de Pierre le grand. La mort de votre ambassadeur Mr de Golofskin redouble encor mes inquiétudes. Le gros paquet que je luy avais adressé pour votre Excellence a bien l'air d'être perdu. Je crois vous avoir déjà mandé que l'adresse de ce balot en toile cirée était à m. de Golofskin etc. pour faire tenir à m. etc. de Showalow etc. à Petersbourg. Un de vos secrétaires peut en écrire à la Haye au secrétaire d'ambassade.a Enfin ma consolation monsieur est de compter toujours sur vos bonnes grâces, sur votre zèle pour la mémoire d'un fondateur et d'un grand homme. Vous n'abandonnerez pas votre ouvrage. J'ay toujours le bonheur de parler de vous avec mr de Soltikof. Il est plus digne que jamais de votre bienveillance. Vous le reverrez un jour très savant et jamais la science n'aura logé dans une plus belle âme. Je vous réitère monsieur mes souhaits pour votre prospérité et pour celle de votre auguste impératrice.
Recevez le tendre respect de votre très humble et obéisst serviteur
Voltaire