1758-12-20, de Voltaire [François Marie Arouet] à Baron Heinrich Anton von Beckers.

Monsieur,

Vous recevrez ma lettre vers le jour de l'an. Ainsi je prends mon temps tout juste pour vous souhaitter l'année la plus heureuse, la plus pacifique, la moins ruineuse, et pour vous supplier de me mettre aux pieds de leurs altesses Electorales. Vous savez avec quel tendre respect je leur suis attaché. Je voudrais pouvoir passer ma vie à la cour de Monseigneur L'Electeur, mais monsieur il faut que je laboure mes terres dans le temps qu'on ravage celles des autres. J'ay acheté deux assez belles seigneuries aux portes de Geneve. Je les aurais mieux aimées dans le voisinage de votre excellence. Je tâcherai de venir vous voir après la récolte. Nous autres laboureurs nous ne pouvons guères disposer de notre temps, mais je seray tout le temps de ma vie avec les sentiments les plus respectueux et le plus sincère attachement

Monsieur

de votre Excellence

le très humble et très obéissant serviteur

Voltaire

Vous me feriez un très sensible plaisir de daigner monsieur envoyer une lettre de change de 6500lt au laboureur qui doit acheter des beufs et des charues.