1778-01-26, de Voltaire [François Marie Arouet] à Cosimo Alessandro Collini.

Le vieux malade, mon cher ami, n'a pas été en état de vous répondre au commencement de cet hiver.
La nature a donné à mon âme un étui très faible et très mauvais qui ne peut guères soutenir à l'âge de quatre vingt quatre ans le voisinage des Alpes, et les inondations de neige. Ma décrépitude est accablée de plus d'une manière. Je n'en suis pas moins sensible à vôtre souvenir et à vôtre amitié.

Je vous fais mon compliment sur le bonheur que vous avez de servir un Prince dont la tête est actuellement ornée de deux belles couronnes Electorales.

La nouvelle de trente mille Autrichiens campés à Straumbing allarme nos pacifiques Suisses, mais je ne puis m'imaginer que l'Empereur veuille, pour son coup d'essai, vous faire la guerre. On dit qu'il ne s'agit que d'un passage, mais ne peut-on point passer sans avoir trente mille hommes à sa suitte? Je ne suis pas politique, je me borne mon cher ami, à vous souhaiter de la paix et […]

Je vous embrasse de tout mon cœur.

Le vieux malade V.