à Geneve le 16 Mars 1754
Monsieur,
Vous avez raison de vous plaindre que dans la Gazette de Basle on ait annoncé l'édition de l'Essai sur l'Histoire Universelle comme revu & corrigé par vous.
Le Sr Philibert assure n'avoir point de part à cette façon indiscrette & fausse d'annoncer son livre; et l'on verra bien le contraire par le livre même dont le titre porte simplement attribué à M. de Voltaire, & dont l'avertissement déclare nettement que vous avez désavoué l'édition de Hollande come étant très fautive & imparfaite; & quoi que l'on donne cette édition pour revüe & augmentée auprès de celle de Hollande, on ne la donne point comme votre véritable ouvrage, mais seulem' come une esquisse qui n'aproche pas de ce que vous donneriez vous même, si vous daigniez y mettre la main. On ne s'autorise de votre nom que pour deux ou trois corrections importantes, & entr' autres une que vous seul pouviez donner sur les momoyes du tems de Charlemagne. Un libraire ne pouvoit pas se refuser de donner ce relief à son édition. Je sais trop, Monsieur, combien vous avez sujet de désaprouver cet ouvrage si fort au dessous du véritable original, pour trouver bon que l'on en donnât une autre idée. Les Annales de l'Empire feront bien voir la différence qu'il y a entre un écrit que vous avouez, & ceux qu'on vous attribue. Je recevrai avant autant de reconnoissance que de plaisir l'exemplaire que vous avez la bonté de m'en promettre. Il est bien à désirer que vous puissiez corriger à votre gré ces peintures historiques & y mettre la dernière main. Ce seroit un morceau aussi utile au public que digne de vous. J'ai l'honneur d'être avec respect,
Monsieur,
Votre très humble & obéisst serviteur
J. Vernet