Le 24 avril 1753
Mon très cher frère,
…J'ai vu aujourd'hui une lettre de Voltaire.
Il va à Gotha, où sa nièce va le trouver. Je doute qu'il vienne ici. Il mande cependant qu'il écrira encore de Gotha. Je suppose que peut-être il a dessein de s'établir ici avec sa nièce, ce que je tâcherai d'éluder. Les lettres qu'il a écrites à ses amis ici (qui sont écrites sans défiance, et qu'on ne m'a montrées qu'après de fortes instances) sont fort respectueuses sur votre sujet. Il vous donne le juste titre de grand homme. Il se plaint de la préférence que vous avez donnée à Maupertuis, et de la prévention que vous avez contre lui. Il raille fort piquamment sur le sujet de ce dernier, et je vous avoue, mon cher frère, que je n'ai pu m'empêcher de rire en lisant l'article, car il est tourné si comiquement, qu'on ne saurait garder son sérieux. Je ne manquerai pas de vous avertir de tout ce que j'apprendrai de lui. Ma faiblesse m'oblige de finir, mais jamais d'être avec tout le respect et la tendresse imaginable, mon très cher frère, etc.