Versailles, ce 13 août 1742
J'ai porté votre lettre, monsieur, à m. le cardinal, et lui en ai fait lecture, ainsi que de celle du procureur-général qui y étoit jointe.
Quoique son éminence pense toujours de même au fond, elle ne pense pas cependant que vous deviez risquer une scène pour un pareil sujet, et elle approuve que vous fassiez dire aux comédiens de supposer la maladie d'un acteur pour de dispenser de jouer la pièce jeudi; et à Voltaire de la retirer de lui même de leurs mains, pour éviter l'éclat. Je crois même que si vous faites bien, vous commencerez par ce dernier parti; et qu'il vous aidera lui même à l'exécuter et à couvrir la démarche. La communication des épithètes que lui donne le procureur-général jointe à un certain arrêt du parlement, en vertu duquel il ne tient qu'à lui de l'informer et de décréter l'auteur des Lettres philosophiques, rendront votre argument persuasif, et par ce moyen vous ne serez commis avec personne. Je me hâte de renvoyer votre exprès, afin que vous puissiez, avant la fin de la comédie, parler à lui ou à madame Duchâtelet. Vous connaissez, monsieur, mes sentiments pour vous.
Maurepas