1752-07-17, de Pierre Robert Le Cornier de Cideville à Marie Louise Denis.

Vous m'avez fait un plaisir sencible Monsieur en me donnant de vos nouvelles.
Les mienes sont assez bonne présentement. Ces eaux de Belaruc m'ont beaucoup fatiguée mais je n'ai plus d'étourdissemens. Vous avez sans doute beaucoup vu Mr de Montigni dans son peti céjour en Normandie. Je le trouve bien heureux de vous avoir eu dans ce païs là. Vous allez passer des jours bien tranquils à votre campagne et je vais être icy bien tourmentée. Je donne actuelement Adelaide sous le nom d'Amelie, pièce de Mon Oncle que vous connoissez. J'ai encor eu bien des tracasseries pour la distribution des rôles. On doit faire cette semaine la père répétition les rôles à la main. Je souaite de tout mon coeur qu'elle ait du succès et je l'espère.

Il me parle bien foiblement de son retour, et je crains fort qu'il ne reviene pas si tos que je l'espérois. Il travaille à une nouvelle édition qui sera fort augmentée. Je voudrois bien qu'elle parût. Comme je me flate que vous prenez quel qu'intérès à ma Coquete je vous dirai que j'y travaille beaucoup. J'ai cessé pendand trois semaines à cause de mes étourdissemens mais je vais m'y remettre et je me flate que j'aurai finy dans quinze jours. Vous serez à Paris lors que je la donnerai dont je suis fort aise, car je me flate que vous aurez pitié d'un pauvre oteur en cornette qui meurt de peur.

Adieu Monsieur, n'abandonnez point le proget que vous m'avez montré. Il m'a paru charment et je ne doute pas que vous n'en fassiez quel que chose de fort joly si vous Continuez d'y travailler et songez quel que fois à une femme qui aura toute sa vie pour vous la plus tendre et la plus inviolable amitié.