1748-09-25, de Nicolas René Berryer de Ravenoville à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

Au moment que j'ay ouvert ce matin votre lettre je n'avois pas encore reçu, Monsieur, la parodie de Semiramis, ce n'est qu'à midy qu'elle m'a été remise, par un de mes commis à qui les comédiens italiens l'avoient laissée.
Vous ne devez pas douter, Monsieur, que dans cette occasion qui regarde M. de Voltaire, dont les talents méritent toutes sortes d'égards, je n'en agisse avec toutte la circonspection possible. Aussi je ne feray rien à cet égard sans en avoir rendu compte à M. de Maurepas; mais ce qui dépend de moi, et ce que je feray certainement, est d'examiner avec la plus scrupuleuse attention cet ouvrage quel qu'il soit, pour qu'au cas qu'on tolère une parodie on y garde au moins les égards qui sont si légitimement dus aux talents supérieurs de M. de Voltaire. L'intérêt même que vous y prenez, Monsieur, sera un nouveau motif pour ne rien laisser passer qui puisse blesser l'illustre auteur de Semiramis, et pour vous le prouver il n'y aura rien de fait sur cela que je n'aye l'honneur d'en conférer avec vous. C'est tout ce que je puis en cette occasion où je ne recevrois pas des ordres supérieurs pour empêcher la représentation de la pièce dont est question. Je vous connois trop juste pour ne pas approuver mes raisons et pour douter un instant de l'attachement sincère et respectueux avec lequel je suis, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Berryer