1743-08-02, de Jean Jacques Amelot de Chaillou à Voltaire [François Marie Arouet].

J'ai reçu mr votre lettre du 21 juillet qui est venüe sous le couvert de mr de Maurepas.
Je ne déciderai point sur le plus ou moins de mérite de la personne dont vous me parlés, ni sur ses sentiments par rapport à son pays; mais Il a certainement tout ce qu'il faut pour remuer la multitude et pour en [. . .] le fanatisme. Il a prouvé à cet égard de ses talents et de son crédit. Je doute beaucoup qu'un homme de ce caractère puisse jamais être attaché à la bonne cause, ni marcher dans les mêmes voyes que ceux qui voudroient qu'on demeurast tranquille, il y perdroit trop personnellement; cependant si vous croyés qu'on puisse le gagner indiqués moy par les quelles vous imaginés qu'on pourroit y parvenir.

A l'égard de l'autre personne dont vous attendés les ordres pour partir, si l'emprunt dont on vous a parlé est véritable, ce n'est sûrement pas par besoin, et je pense que vous en avés deviné la véritable raison. Ainsy il me [?paroît] peu vraisemblable qu'elle fût tentée de la chose que vous voudriés qu'on luy fît, quoique je ne voye point d'inconvénient qu'en parlant comme de vousmême vous lui laissiez envisager la chose comme possible. Je me flatte que vous êtes bien persuadé de mes sentiments pour vous.

Je crains que cette même personne n'ait été prévenue sur le véritable motif secret de votre départ de ce pays cy. Je vous en avertis pour que vous preniés plus d'attention à ne vous pas découvrir.