1768-02-11, de — Meunier à Voltaire [François Marie Arouet].

Monsieur,

Le 6e de ce mois, M. de Morantcour, mon Beaupère a donné sa dernière Gazette au public, & a eu la satisfaction d'y anoncer L'article concernant la famille Sirven.

Ainsi la Gazette du 10e février qui vient de paroitre, est le premier essor d'une autre plume, dont, de toute la production rien absolument ne roule, n'y ne doit être mis sur son Compte.

C'est par une suitte de son dévouement pour Vous Monsieur, qu'il a souhaitté que j'eusse l'honneur de Vous faire observer ce Changement; Vous en sentirez assez le motif & la raison.

Depuis deux ans, mon Beaupère sollicitoit sa retraitte, par rapport à son âge de 74 ans, & à ses infirmités: Une maladie qui a manqué de le coucher au Tombeau, a fait craindre, & finalement déterminé Messieurs Fischer, à luy trouver un successeur, dans la personne d'un Dauphinois, que comunément on soupçonne être de cette nouvelle espèce de Vagabonds, du nom delaquelle, dans sa première gazette, luy même désigne les Jesuittes.

M. de Morantcour Vous prie Monsieur d'agréer ses respects très humbles ainsi que les assurances de sa Considération la plus distinguée; j'ose Vous demander la grâce de Vouloir m'envisager comme de moitié dans ces sentimens, que j'ay l'honneur de Vous exprimer de sa part; puisqu'ils animent toute la façon de penser avec laquelle j'ay celuy d'estre sans réserve

Monsieur

Votre très humble & très obéissant serviteur
Meunier négt à Berne