A Dijon, le 4 juin 1746
… Je ne sais ce qu'on aura dit et pensé à Paris du discours de Voltaire; pour moi je vous avouerai naturellement qu'il m'a fait un très grand plaisir, quoi-qu'il y ait bien des choses à reprendre, une trop grande foule de noms propres, d'éloges, de traits et de digressions déplacées, surtout sur la fin du discours, dont il faudrait retrancher un bon tiers contenant le poème de Fontenoy en prose, quoiqu'il ait été fort stérile dans ses actions de grâce à l'Académie, et qu'il ait parlé de Fontenelle, ci-présent, comme d'un pauvre défunt.
Néanmoins, toute la partie de son discours qui roule sur les causes du progrès de la langue et de la décadence actuelle du goût, m'a paru également vraie, juste, sensée, bien écrite. On dit que ce n'était pas sa place, mais moi je trouverais, au contraire, que rien n'est mieux placé dans un discours académique, et que cela vaut mieux qu'une perpétuelle monotonie d'éloges rebattus. Enfin, il me semble que ce discours est un des meilleurs que j'aie lus. Celui de l'abbé d'Olivet n'est ni fort éloquent, ni fort bien écrit, mais la partie qui contient l'éloge de notre ami le président Bouhier est tout à fait touchante et bien traitée….