1739-03-07, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

Mon cher ange gardien voylà votre oncle devenu un trône, une domination, unus ex altissimis.
La santa chiesa e una bella cosa per Dio, et vous serez vous toujours conseiller au parlement? Non. Je veux vous voir aussi une domination parmy les profanes. Oh par dieu vous aurez des places majeures, mais ce ne sera point en Amerique.

Si parmy le fracas des compliments et des cérémonies vous avez du temps pour Zulime, je vous l'envoye par Tiriot, cacheté de trois cachets des armes de madame du Chastelet.

Voylà quatre fois que je vous dis qu'il y a six semaines que Tiriot devoit vous faire tenir le commencement de L'essay sur Louis 14.

Je baise vos ailes mon cher ange, et celles de l'ange madame D'Argental si elle daigne le permettre.

Eh bien st Michel vous écrasez donc le dragon Desfontaines? Grand merci, protecteur des justes.

Si l'abbé de Breteuil est par votre moyen conclaviste de votre oncle, vous serez l'ange de tout le monde. Je peux vous assurer que le Cardinal de Tensin ne peut s'attacher un homme plus aimable, qui sache mieux ce qu'il faut savoir, et qui soit plus capable de faire ce qu'il faut faire.

Adieu cher ange.

Apropos vrayment je n'ay pu changer les 1ers actes de la façon dont vous l'aviez ordonné. J'ay essayé, cela n'alloit pas bien. Zulime n'étoit plus qu'un trouble fête. Les cœurs entrainez d'abords pour Atide ne pouvoient revenir à Zulime. Messieurs du conseil pezez cela.

Ce n'est plus Tiriot qui vous envoye Zulime, madame se défie de luy, et s'y prend par une autre voye.