1740-03-22, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

Ange de paix, eh bien comment trouvez vous donc ce commencement de l'histoire du siècle de Louis 14?
Je crois que j'en pourais faire un ouvrage bien neuf, et peut être honorable à la nation; mais comme je suis traitté dans cette nation pour qui je travaille?

Et Zulime, Zulime! Si le 5ème acte n'est pas à votre fantaisie je n'ay qu'à me noyer, car j'y ay mis tout ce que je sçai. J'ay vu de baux yeux pleurer en le lisant! mais je me défie toujours des baux vers. Celles qui les portent sont d'ordinaire séduites ou trompeuses. La personne dont je vous parle est peutêtre trop séduite en ma faveur. Cependant elle n'a guère pleuré à Mérope, et elle a pleuré beaucoup à Zulime.

Pour l'amour de Dieu n'exigez pas que je commence par faire de Zulime un trouble fête! Quelle cruelle idée mon conseil a t'il eue! Croyez moy, il n'y auroit plus d'intérest. Atide doit ne pas déplaire, mais Zulime doit déchirer le cœur. Prenez y garde, tout seroit perdu.

Aureste mon conseil est le seul conseil dans Paris qui soit instruit des affaires d'Afrique. Si cela pouvoit être joué à pâques, je bénirois Mahomet. Décidez.

Il y a bien autre chose sur le tapis. Adieu mon adorable amy. Toujours sub umbra alarum tuarum. Je suis bien persécuté, tout va de travers, mais vous m'aimez, Emilie m'aime, c'est la réponse à tout.