1772-04-29, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

Mon cher ange, vous saurez d'abord que Mr Hubert, genevois qui va à Paris, vous remettra un neuf.

Ensuite vous saurez que l'avocat Du Roncel est convenu de tout ce que vous dites dans vôtre Lettre du 13e avril. Il y a remédié comme il a pu, ainsi qu'à quelques autres déffauts. Il vous enverra une nouvelle copie de son factum bien et duement corrigée. Il se pressait d'abord de faire porter sa cause à l'audiance, parce qu'il craignait ce qui est arrivé; et les mêmes raisons qui lui donnaient de la vivacité le forcent à présent à temporiser beaucoup.

Il sait d'ailleurs que vôtre ville de Paris est remplie des plus sottes, et des plus violentes cabales, des intrigues les plus ridicules, des plus absurdes calomnies en tout genre. Si vous avez vu un petit libelle intitulé Réflexions sur la jalousie, composé par un ancien associé d'Helvetius, voicy ma réponse. Si le libelle est public je la publierai; s'il est inconnu je la suprimerai. Mandez moi, je vous prie, si on nomme l'auteur du libelle, soiez sûr que je vous garderai inviolablement le secret.

Sur ce je me mets sub umbra alarum tuarum.

V.

J'ai lu ce plaidoyer en faveur du comte de Morangiés. N'êtes vous pas indigné contre Gerbier, qui soutient des coquins absurdes dont le crime saute aux yeux? Il faut que l'absurdité soit bien faite pour le peuple, puisque tout Paris a pris le parti de ces misérables.