A Cirei par Vassi 4 octobre [1735]
Vous voyez, monsieur, ce qui arrive de cette impression malheureuse.
Voyez si vous êtes intéressé à repousser la calomnie. Voilà l'abbé des Fontaines, un homme qui me doit tout, à qui j'ai sauvé l'honneur et la vie, que j'ai tiré de Bissetre, dont j'ai fait suspendre le procès criminel et qui, depuis ce temps là, n'a jamais eu à se plaindre de moi; voilà, dis je, ce même homme qui dans ses feuilles ose dire que la tragédie que vous avez fait jouer est une pièce contre les bonnes mœurs.
Je m’étais adressé à lui pour le prier de faire connaître au public que je n'ai nulle part à cette misérable édition où mon ouvrage est si défiguré. Et n'avais je pas quelque droit de compter qu'il parlerait au moins de moi avec honnêteté? Cependant pour toute réponse il fait imprimer ma lettre sans m'en avertir et joint à cette grossièreté, à cette faute contre la société, les plus mauvaises critiques et les plus lâches calomnies.
Ce qu'il y a de plus cruel, monsieur, c'est que je sais qu'on a dit à m. Rouillé, qui est seul chargé de la librairie, que la Mort de César est l'ouvrage d'un mauvais citoyen et que c'est moi qui l'ai fait imprimer furtivement pour braver les règles que m. le garde des sceaux a établies.
J'ose dire, monsieur, que votre probité doit vous engager à réfuter de telles calomnies. Vous êtes à portée de les faire réfuter dans les journaux et dans toutes les nouvelles publiques. Je vous le demande en grâce. Vous devriez bien aussi vous donner la peine de voir m. Rouillé ou de lui écrire pour le prier de faire des recherches contre l’éditeur. M. Hérault ne se mêle plus de la librairie.
Je vous supplie instamment, monsieur, de vouloir bien vous donner un peu de mouvement dans une affaire qui est devenue la vôtre. Je vous en aurai une obligation infinie. Donnez, monsieur, je vous en conjure, cette marque d'amitié à l'homme du monde qui est le plus rempli d'estime et d'attachement pour vous.
Volt.