à Berlin le 25 de mai 1728
Monsieur,
J'ai l'honneur de vous écrire par ordre de notre incomparable Reine qui a reçu avec plaisir le présent que vous lui avez fait du plus beau Poëme Epique que nous aions encore vû dans nôtre langue.
Elle m'a commandé de vous remercier de sa part, et de vous faire savoir qu'Elle vous a envoié deux médailles d'or, qui vous seront un témoignage de l'estime qu'Elle fait de vôtre excellent ouvrage, et de vôtre beau présent. Au reste, Monsieur, ne comptez pas pour médiocre l'approbation que Sa Majesté donne à vos écrits, je veux dire à vôtre Oedipe, vôtre Mariamme, et vôtre Poème.
Elle les a tous lûs et honnorez de son estime. Que ne puis-je ici vous faire sentir combien cette approbation vous est glorieuse? Autant que nôtre grande Reine est respectable par son rang, sa naissance & sa vertu, autant est-elle estimable par son bon goût et son discernement. Si vôtre Muse vous inspire à chanter les Héros, peut être vous dictera-t-elle un jour quelque chose pour une Héroine qui est au dessus de toutes nos louanges.
Après un sujet si sublime, je n'ose vous dire, Monsieur, quelle est l'estime que j'ai pour vous. Je ne fais pas assez de figure dans le monde pour croire que vous puissiez vous glorifier de me compter entre vos admirateurs.
J'ai l'honneur d’être avec beaucoup d'estime & de respect
Monsieur
Vôtre très humble et très obéissant Serviteur
M. Veyssière La Croze