[c. 1 June 1774]
Monsieur,
J'ai l'honneur de vous écrire aujourd'hui par ordre d'une Reine, soeur de Frederic et Mère de Gustave, Protectrice des lettres et admiratrice du premier Littérateur de notre siècle.
Cette Reine a institué, comme vous le savés, une académie, consacrée aux Belles Lettres, qui s'assemble dans son Palais, toujours en sa présence; et S. M. a pensé que la postérité pourroit mal juger du discernement de cette société Littéraire, s'il se trouvoit un jour, qu'ayant existé de votre tems, elle n'eût pas cherché à s'aproprier votre gloire. S. A. a donc écouté également son penchant et les intérêts de l'Académie, en vous faisant inscrire sur la liste de ses Membres, et c'est en qualité de directeur actuel de cette Académie que j'ai l'honneur de vous faire part de cette résolution de S. M. Je sais bien, Monsieur, que le premier, le plus illustre académicien de son tems ne peut guère se sentir flatté de se voir associé aujourdhui à la moins célèbre de toutes les Académies. Mais comme cette société, toute récente qu'elle est, jouit néanmoins d'un avantage qu'elle ne partage avec aucune autre, celui de travailler sous les yeux d'une Reine, dont le nom est un de ceux qui honoreront et désigneront ce siècle, je suis persuadé que vous ne trouverés pas le titre qui vous est à présent offert indigne de ceux dont vous êtes décoré déjà. Je suis bien aise, Monsieur, d'avoir en mon particulier, l'occasion de vous rapeller notre ancienne connoissance qui date d'un tems, dont le souvenir doit vous être infiniment agréable. J'ai toujours conservé depuis et vous fortifiés tous les jours d'avantage l'admiration avec laquelle j'ai l'honneur d'être.