1723-07-15, de Voltaire [François Marie Arouet] à Marguerite Madeleine Du Moutier, marquise de Bernières.

Je pars dans l'instant pour Vilars, où je vais me reposer quelques jours de touttes les fatigues inutiles que je me suis données dans ce pays ci.

Heureusement la seule négotiation où j'aie réussi est une afaire dont vous m'aviez chargé; vous pourez avoir pour quatrecent francs tout au plus, et probablement pour cent écus la petite loge que vous demandez pendant l'hiver. J'ai promis de faire un opéra pour pot de vin; si je suis siflé il ne faudra s'en prendre qu'à vous. Je croi que monsieur de Berniere viendra mardi coucher avec vous; je voudrois fort estre à sa place, mais je n'aurai la satisfaction de vous faire ma cour à la Riviere que dans quinze jours.

Je ne sai autres nouvelles, sinon qu'e n'a décerné un ajournement personel contre les frères Belisle; on en vouloit faire autant au sieur le Blanc, mais les voix ont été partagées. Mr le comte de la Marque, fils de mr le prince de Conti, a la petite vérole. Les fêtes grecques et romaines de Fuzelier et de Colin Tampon sont jouées à l'opera et siflées par les honnêtes gens. Monsr le duc d'Orleans, a chanté ah Colin tai toy. Colin auroit dû répondre j'en connois bien d'autres qui sont comme moy. Adieu, je vous assure que Vilars ne m'empêchera pas de regreter la Riviere.