1722-06-15, de Voltaire [François Marie Arouet] à Marguerite Madeleine Du Moutier, marquise de Bernières.

J'ai assez bonne opinion de vous madame pour croire que vous vous souviendrez de m’écrire parmi les embaras de votre déménagement; j'attens avec impatience la nouvelle de la conclusion du traité avec mr de Bauville.
Je vous déclare d'avance que je veux avoir un pot de vin de cette belle afaire, qui sera s'il vous plait un bon souper avec milord Bolimbrok et mr de Maisons dans votre nouvau palais. Je croi que la proposition ne vous déplaira pas; mandez moi si vous êtes aussi contente des services de Rouxel et de mon naim que je le suis de st Germain.

Et vous mon cher Tiriot mandez moi si vous êtes déjà en possession de votre taudis; je vous demande instamment un Virgile latin, et un Homere françois (non pas celui de la Motte). Envoiez cela je vous prie au suisse de l'hôtel de Vilars pour me le faire tenir à Villars. J'en ai un besoin pressant. Envoiez le moi je vous en prie plutôt aujourd'hui que demain. Ces deux autheurs sont mes dieux domestiques sans les quels je ne devrois point voiager; aiez donc la bonté mon cher ami d'user en cette occasion de toute la diligence que peut avoir un aussi grand paresseux que vous.

Adieu madame, adieu notre ami, aimez moi un peu, faites mes complimens au maître de la maison si vous le rencontrez.