A la Chênaie 26 avril 1822.
La sainte volonté de Dieu ! ma chère amie, je ne trouve que ce mot à vous dire; mais vous êtes chrétienne, il vous suffira. La sainte volonté de Dieu. Est-ce qu'il n'y a pas dans cette parole une grande, une surabondante consolation? Voyez Jésus dans son agonie : Non pas ce que je veux, disait-il à son Père, mais ce que vous voulez. La paix est dans ce saint abandon, elle n'est que là. Point de pensées humaines, point de réflexions de la terre, qui épuisent l'âme, irritent les regrets. Dieu l'a voulu; il est bon, sage, plein de miséricorde et de tendresse pour nous ; n'accusons pas sa providence par une douleur trop amère. Pleurons, il nous le permet, mais pleurons en regardant le ciel, en bénissant les voies inconnues de la Providence. Hélas ! nul de nous ne sait ce qui lui est bon, ni à ceux qui lui sont chers. Que ferons-nous donc quand il arrive quelque événement qui nous afflige? Nous dirons avec Jésus: Oui, mon Père, parce qu'il vous a plu ainsi ; et avec un cœur brisé au milieu des souffrances et des défaillances de la nature, nous chanterons le Cantique des saints, qui n'est qu'une louange éternelle de l'adorable volonté de Dieu. Ayez soin de votre santé, c'est une chose que Dieu demande de vous. Songez à votre tendre et vénérable mère à qui vous vous devez, et faites tout au monde pour lui épargner de nouvelles inquiétudes. Je n'ai pas besoin de vous dire tout ce que mon pauvre cœur éprouve pour vous en ce moment. La douleur que vous ressentez semble ajouter quelque chose de plus vif encore à l'attachement si vrai et si tendre que je conserverai pour vous jusqu'à mon dernier soupir, et, je l'espère, dans l'éternité. Puissé-je vous y précéder, vous et toutes les personnes qui me sont chères. Oh! si j'ai le bonheur de voir le bon Dieu, que je le prierai ardemment pour les chères compagnes de mon exil, à qui j'ai dû tant de doux moments, et dont le souvenir aimable et tendre est toujours au fond de mon cœur, comme son bien le plus précieux ! Je vous l'avoue, la terre me pèse, j'ai besoin de regarder en haut. Je suis las de ce qui passe et qui nous déchire en passant. Oh ! vous qui ne passez point, vous le seul bien parfait et à jamais immuable, ô mon Dieu, quand vous verrai-je? quand entrerai-je dans votre joie sainte et votre éternel repos? Cependant, non ce que je veux, mais ce que vous voulez.
Adieu, très-bonne et très-chère amie, je prie pour vous; priez pour moi, pour votre pauvre mais bien tendre ami.