1777-10-22, de Voltaire [François Marie Arouet] à Louise Suzanne Necker.

Madame,

Une fois vous me fites l'honneur de m'écrire, et je répondis à Monsieur Neker par pure bétise, aiant pris vôtre écriture pour la sienne.
Aujourd'hui Monsieur Neker m'honore d'une très bell et très consolante Lettre, et c'est à vous que je réponds. Je vous demande, Madame, une très grande grâce, c'est de le remercier pour moi. Vous avez plus de temps que lui, quoique vous n'en aiez guères, et vous avez toujours eu de la bonté pour moi. Je ne veux pas qu'il reçoive une Lettre où il serait question de Zaïre parmi une foule de placets et des comptes des fermes générales. Je vous suplie seulement, Madame, de lui dire combien j'ai été touché de ce qu'il m'a écrit.

Soiez bien persuadée que je viendrais me mettre au nombre de vos courtisans, si mes quatre vingt quatre ans, mes quatre vingt quatre maladies, et mes quatre vingt quatre sottises, ne me retenaient au bord de vôtre lac, que Dieu merci vous ne reverrez plus.

Souvenez vous un petit moment de vôtre respectueux et fidèle serviteur

V.