à Ferney 16e Mars 1776
Messieurs,
Aiant eu le bonheur ou le malheur de fonder une Colonie qui fait un assez grand commerce; aiant été obligé de bâtir pour les artistes beaucoup de maisons et de magazins; étant pressé par les architectes à qui je dois plus de quatre vingt mille Livres, et me voiant menacé à l'âge de près de quatrevingt trois ans, de mourir sans avoir paié mes dettes, je n'ai d'espérance que dans la justice et dans la magnanimité de son Altesse sérénissime Monseigneur le Duc De Virtemberg.
Il me devra au 1er juin quatrevingt mille cinq cent Livres. Je demande qu'il veuille bien me faire fournir des Lettres de change en quatre termes, soit sur Strasbourg, soit sur telle autre ville qu'il lui plaira. Mes créanciers consentent à ne recevoir leur paiement que de trois mois en trois mois.
Ainsi vous aurez, Messieurs, quinze mois entiers pour éffectuer ce paiement, qui sera de vingt un mille cent trente et une livre 5s par quartier, à commencer du 1er juin prochain.
Je me flatte que cet arrangement sera agréable à Monseigneur le Duc, à qui j'ai autant d'envie de plaire, que j'en ai de paier mes dettes. Je lui envoie la copie de cette Lettre.
J'ai l'honneur d'être respectueusement
Messieurs
Vôtre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire