25e juillet 1775
Un pauvre campagnard, Monsieur, tel que je le suis, doit toujours craindre d'avoir mal pris son tems, et d'avoir commis quelque indiscrétion avec Messieurs les parisiens.
J'ai très grand scrupule sur un papier que je vous ai envoié, et sur lequel vous ne m'avez point fait de réponse. C'est une affaire dans laquelle je n'ai voulu prendre aucun parti avant de savoir l'opinion de quelques amis, et surtout la vôtre. Je n'en ai adressé des éxemplaires qu'à quatre ou cinq personnes, dont le jugement doit me tenir lieu de celui du public. Quoique ce soit une requête au conseil je me suis cependant bien donné de garde d'en faire présenter aux ministres. M: Turgot est le seul auprès de qui j'aie osé prendre cette liberté parce que je sais la manière dont il pense sur cette affaire.
Je présume que vous avez pu craindre une publicité trop grande, et qu'en ce cas vôtre prudence vous a empêché de vous expliquer avec moi. Mais comme cette affaire n'a fait et ne fera aucun éclat, permettez moi de vous demander seulement, si vous reçûtes mon paquet il y a environ trois semaines, et si vous avez eu le tems de le lire. Je dois croire que vous n'avez pas trop de tems à vous, et que Monsieur Turgot vous occupe plus que jamais. Tant mieux pour la nation!
Je ne veux pas abuser de vos bontés, je ne vous demande qu'un mot pour me tirer d'inquiétude.
Le vieux malade, plus malade que jamais, vous renouvelle, Monsieur, tous les sentiments qui l'attachent à vous.
V.