1775-06-30, de Voltaire [François Marie Arouet] à Marie Anne Françoise Mouchard, comtesse de Beauharnais.

Quoique vous viviez, madame, parmi les Welches votre esprit sait être raisonnable.
Vous avez des talents et des grâces modestes, et avec cela un cœur naïf qui ne damne personne. Il faut bien croire aux miracles, et se soumettre à un dieu: je ne m'aviserai point de dire auquel, mais je dirai, madame, que ce dieu m'a été prouvé trop tard, et que les bontés dont vous m'honorez, m'inspirent autant de regret que de reconnaissance.

A quoi peut on servir sur la fin de sa vie?
Ah! croyez moi, choisissez mieux.
Toujours un vieil aveugle ennuie;
C'est un aveugle enfant qu'il faut à vos beaux yeux.

Fontenelle, lorsque vous ne songiez pas même à naître, s'écriait, en voyant une jolie femme: Ah, si je n'avais que quatre-vingt ans! Les années d'aujourd'hui pèsent bien plus. Que n'ai je du moins, comme Titon, le bonheur de les avoir précipitées pour vous! Je mets aux pieds de la belle muse française, l'hommage très respectueux, madame, du vieux malade.

V.