3 novembre 1777
J'ai reçu, monsieur, au château de Pierre, solitude où j'ai passé l'automne, le billet affligeant que vous m'avez fait écrire.
Mais, si mes lettres de Paris ne me trompent point, vos agonies sont bien douces; puisque vous faites des mariages, &, qui plus est, des miracles. Vous voulez sanctifier vos derniers moments.
Je suis dans la patrie d'un poète, depuis cardinal: ainsi tout chemin mène à Rome. Je vous écris d'un de ses terres, & d'un de ses châteaux, loin des aboiements de l'hyène. C'est ici que naquirent ses premières chansons: je le dis tout bas, car
Son château est habité par la marquise de Bernis, sa belle-sœur & ma cousine germaine. Si sept villes se sont disputées le vieil Homère, il doit m'être permis de réclamer la parenté d'une femme aimable. Madame de Bernis appartient au cardinal par le nom & par les grâces de l'esprit. Nous relisons ensemble vous ouvrages: elle y prend un plaisir qui alarme quelquefois son pasteur.
Damner la belle-sœur d'un cardinal, le bon coup! Elle voudrait vous aller voir; mais sa santé l'attache à la vie tranquille des châteaux. Le mot d'agonie la fait frémir; elle s'est hâtée de vous proposer des remèdes.
Recevez de ma part, monsieur, non un baiser, mais les assurances de mon admiration & de l'attachement respectueux avec lequel je suis, &c.