30e Mars 1775
Le vieux Perrin Dandin vous remercie bien, Monsieur, de lui avoir envoié le dernier mémoire de Mr Le Comte de Guines.
Il en reçut un autre le même jour, sans qu'il pût savoir à qui il le devait. Il ne présume point du tout que Mr Le Comte de Guines lui ait fait cet honneur lui même; il l'en remercierait malgré ses maladies qui le rendent très souvent incapable d'écrire
Il semble que les mémoires signés Tort, soient des armes parlantes. Jamais aucun Tort ne m'a paru plus évident. J'ai la vanité de croire que Dieu m'avait fait pour être avocat. Je vois que dans toutes les affaires il y a un centre, un point principal contre lequel toutes les chicanes doivent échouer. C'est sur ce principe que j'osai me mêler des procez criminels affreux et absurdes, intentés contre les Calas, les Sirven, Montbailly, contre Mr de Morangiés.
Je tiens la cause de Mr le Maréchal de Richelieu pour infaillible, par le même principe. Je crois même qu'il est impossible à ses ennemis de penser autrement. Je suis persuadé que si les juges se trompent si souvent c'est que les formes ne leur permettent guères de peser les probabilités. Ils opposent une loi equivoque à une autre loi équivoque, tandis qu'il faudrait opposer raison à raison, et vraisemblance à vraisemblance. Tout procez est un problême, il faut avoir l'esprit un peu géométrique pour le résoudre. La mort est un problême aussi, je le résoudrai bientôt, mais il m'est démontré qu'en attendant je vous serai attaché, Monsieur, avec la plus vive reconnaissance.
V.