Quoique nos compatriotes mon cher Voltair ne soient plus come ceux avec qui vous et moy avons été élevés j'aime cependant tout ce qui sent l'amour de la patrie et bien encore tout ce qui vient de vous.
Ainssi vous pouvés juger combien ce zèle que vous marqués pour ceux qui ont été prits à Cracovie et parmi les confédérés après des actions de valeur dignes des antiens françois et de votre comisseration mérite tout les éloges que je vous rends de grand coeur, mais sa Mté de toute les Russie a senti sans doute qu'elle pouvoit nous croire endormi mais non pas morts et que les procédés qu'elle vous confioit qu'elle vouloit avoir ne méritroit l'éloge de la prose ni des vers dont elle paroist très friande et dont efectivement elle a grand besoin pour couvrir quellques de ses petites fredaines (si elle ce soucie des éloges de la postérité). Mr Daiguillon m'a dit il y a deux jours que non seulement nos François prisoniers ne sont point envoyés en Siberie mais que le Roy de Pologne leurs a doné deux mille ducats. Je n'ai été étoné dans ce procédé que de ce qu'il les avoit eu dans l'état afreux où sont ses affaires et sur le champ le Roy aprits des mesures pour les lui faire tenir, ce qui doit lui faire plaisir je croits. Mais, ápropros de prisoniers et de Siberie la nouvelles qui s'en sont sauvés et sont arivés à Macao par Kamcha Ka mérite encore plus de louange que ceux qui les avoit mits dans le cas de recourir à ces exès de courages et d'adresse pour échaper aux traitements qui sont proscrits de tout les pays qui ce piquent d'estre un peu civilisés et l'impératrice de toute les Russies n'avoit pas doné cette foits là de la pâture à ses paregenite. Je ne sai coment vous vous seriés tiré d'affaire sur cette article là, vous avés besoin de toutes les ressources de votre imagination pour trouver quellque chose de bon à dire. Mais la paix va metre à l'abri, de ses actes digne des scistes indécrotés, et parconséquent d'avoir recours à demender quellques choses à ces barbares. Je reçus votre letre très peu de jours même d'instants avant mon départ pour Venir ici et mr Daiguillon venoit de m'instruire de tout.
J'ignore encore où sont les lois de Minos et quand elles seront promulguée. Je me metre alors dans la foule pour les entendre. J'alé la Veille de mon départ, à la comédie pour voir si tout ce que j'avoits entendu doner de louange à la soeur de melle de st Val étoit menti. Je lui Vits jouer Zaire avec un Visage fort audessous assurément de celui de melle Gossin, mais d'une manière d'ailleurs fort supérieure à ce qu'il m'a paru, et ce que je lui ai trouvé qui est si rare à nos actrices, c'est ce jeu muet que vous n'avés vu ni moy non plus qu'au Vieux Baron, par ce qu'il s'ydentifioit de telle sorte dans le personage qu'il représentoit qu'il croyoit de bone foy estre ce qu'il jouoit et avoir des talents supérieurs pour tout représenter. Nous n'en avons eu que les restes mais il y en avoit encore assés pour nous faire voir ce qu'ils avoient dû estre et doner des leçons et des exemples pour touts ceux du même métier dont les bones traditions sont presque entièrement perdues. J'ai ici une troupe qui est assurément la meilleure qu'on puisse rassembler en province et qui l'est pour le moins autant que celle de Paris dans plusieurs pièces, car je vients de voir pour cent quatre vint huit milles livres de gages d'acteurs sans les frais de luminaire & on joue ici touts les jours plus régulièrement qu'à Paris, mais vous sentés qu'il est bien dificile de ratraper touts ses frais là. Cependant cela va encore quoique tout soit augmenté de prix hors les billets des auditeurs. Je m'en plaints come mr Josse car je suis à la teste des actionaire qui soutienent cette troupe et qui même n'y ait pas encore perdu, et j'ai même gagné avant l'excès où il a falu porter les engagements.
Vous devés bien croire que cette lettre est comencée à Paris, continuée ici et interompue par la nouvelle la plus qu'il restoit à essuyer pendant ma vie, c'est celle de la mort de me Daillon et le même courier m'aporta une de ses letres. Je passoits ma vie avec elle et l'aimoits depuits plus de cinquante ans sans avoir jamais trouvé en elle rien qui pût m'empescher de penser qu'elle ne fût digne de tout mon atachement. J'ai été saissi et acablé à un point que je ne puits vous dire. La première chose que j'ai faire quand j'ai eu la force de lire quellque chose, c'est votre letre et les loix de Minos qui y étoient contenues et je réponts bien du plus grand succès si elle est jouc͞e. Il n'y a certainement peu qui dût l'empescher dans un autre tems mais dans celui où touts les esprits sont atachés à une couverture que deux partits veulent chaqun tirer de son costé, on veut voir tout ce que l'on souhaite, tout est susceptible alors d'allusion come d'illusion. Soyés très sûr mon cher Voltair vous-vous croiriés plus étranger dans la cour de France et sa capitale, que vous ne le trouviés quand vous l'avés quitée au tems de Louis quatorse que nous avons vu touts, et pour ceux là il y auroit de quoi ce désespérer à qui voudroit prendre les choses à coeur. Il est incompréhensible après ce que je vous dits que l'on puisse conserver quellqu'amour de la patrie. Je ne me comprents pas moy même, il faut que l'âme des Decius me soit arivée par quellque chemin que je ne cognoits pas encore ni vous non plus. Je suis persuadé que si j'étoits de leurs tems que j'auroits fait de même, mais le changement des estres de celui non pas changé le mien aproportion puisqu'il me reste encore quellque tainture qui pour dire la Vérité a diminué chaque année. Apropos des propriétés de la matière que dite vous de cett enfant qui voit l'eau dans les entrailles de la tere? Je sents bien que la pèr chose qu'il faut faire est de douter et d'examiner, mais les récits de la gasete ont un grand caractère de vérité.
Il faut que je Vous dise quellques petite misère faciles à changer que j'ai remarqué parceque peu de gens sont capables de sentir les grandes et touts le sont des Bagatelles et d'y doner des ridicules ce qui est le talent du tems et dangereux pour ceux qui travaillent pour le public. Par exemple, à la 2 scènes du pr acte Asterie, mon digne et tendre père, mille drosle trouvroit que cela ressemble aux che père et che mère dont parle toutes les putains et il faut anoblir ces expressions tendres vis à vis tant de gens qui ne le sont pas.
Dans l'acte premier, scesne per Teucer dit
J'ai perdu ma famille et je l'ai bien vengée.
Certainement on ce rapelera Pourseaugnac récitant son démeslé à l'auberge de petit Jean qui parlant de l'home à qui il avoit afaire, il me dona un souflet mais je lui dits bien son fait. Un Roy qui convient qu'on lui a tué sa famille n'en doit faire l'aveu qu'avec de grands noble detaills de vengeance, ou s'avilit un peu.
Acte cinquième scesne per
Ou pour ou contre moi tirés enfin l'épée/ mauvais Vers, expression Basse.
Scesne seconde Asterie
Que Teucers admira sur le troien rivage/ mauvaise expression de la fin du Vers.
De même dans la scesne suivante, [? encore] Asterie.
Où cachés aux raions de l'oeill qui luit au monde/ mauvaise expression de la fin du Vers.
Tout cela n'est que Bagatelle facile à changer si vous le trouvés come moy que cela a frapé à la lecture rapide et sont des choses qui échape encore plus facilement à un auteur dont le génie créateur ne doit pas prendre aux créatures qui sont capable de relever de pareille chose. Je me souvients de votre lecture de Mariane, ou vits pour toy, vits pour moy, vits pour nos chers enfants, vous faisoient fondre en larmes en les prononçant et tout le monde et tout le monde de même hors Pierot qui releva touts ces Vits qui comença par vous même et que vous finîtes par changer.
Ce que j'aime sur tout de cette pièce après après avoir remué le coeur et l'intérest elle ne finit point come toutes les autres par un masacre mais par une catastrophe noble, entéressante et qui sèche les larmes sans rien prendre sur l'admiration. Voilà mon cher Voltair ce que j'ai pensé et ce que je vous prie de [? Banir] si vous le trouvés ridicule car je n'atache à mon sentiment que l'envie de vous prouver l'intérest que je prends à tout ce qui vous regarde. Mendés moy aussi si par hasart on trouvoit qu'il ne faut la jouer à Paris vous aprouvriés que je tâchasse d'avoir la tolérance de la faire jouer ici où nous aurons de quoi le rendre plus que passablement.
à Bord . ce 27 juin 1772