à Ferney par Genève 17e Juin 1772
Je ne puis, Monsieur, vous remercier assez de la bonté que vous avez eue de m’envoier Vôtre traduction de trois livres de Pline.
La bordure vaut mieux que le tableau. Vos notes m’ont instruit, et m’ont fait un plaisir extrême. Vôtre plume me donne une très grande idée de vôtre cizeau. Je vois du génie dans tout ce que vous écrivez, et je juge que ce génie respirera dans la statue de Pierre le grand. Si je n’étais pas octogénaire, et si j’avais de la santé, j’irais voir ce chef-d’œuvre. Mais ce serait à condition de trouver la statue de Catherine seconde vis à vis celle de Pierre premier.
Vous faites, Monsieur, beaucoup d’honneur à nôtre nation dans les païs étrangers; nous en avions besoin. Si je me livrais à tous les sentiments que vous m’inspirez, je vous écrirais un volume; mais le triste état de ma santé me force de m’arrêter, sans pouvoir vous exprimer l’estime infinie avec laquelle J’ai l’honneur d’être, Monsieur, Vôtre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire