à Ferney 6e xbre 1771
Il serait triste pour moi, Monsieur, de mourir sans voir celui à qui j’ai obligation; mais en attendant que je puisse jouir d’un si cher avantage, je dois vous dire que la saisie de mon bien qui était entre les mains de Mr Magon, me jette aujourd’hui dans un embarras inéxprimable.
J’ai établi une Colonie qui fait un commerce utile à l’état. Cette colonie va périr si je ne lui donne de nouveaux secours. Pouvez vous avoir la bonté de me faire vendre Cent mille francs de contracts? Je ne disputerai pas sur le prix, et je regarderai cette grâce que vous me ferez comme la plus grande faveur.
Voilà où l’opération de Mr L’abbé Terray m’a réduit. Si je ne puis parvenir à vendre mes contracts, vôtre amitié seule me console. Si je puis les vendre j’aurai le bonheur d’être utile à l’état autant que le peut comporter ma petite sphère. Mon plus grand bonheur est d’avoir trouvé un ami tel que vous.
J’ai l’honneur d’être avec la plus sensible reconnaissance, Monsieur, Vôtre très humble et très Obéissant serviteur
Voltaire