1773-08-27, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

Mon cher ange, les côtes de Malabar et de Coromandel, l’Indus et le Gange, la mauvaise tête et le triste cou du pauvre Lalli, le procès pitoyable de mr de Morangiés, l’absurdité de mr Pigeon, mes craintes qu’il n’y ait quelques Pigeons dans le parlement, les embarras multipliés que me donne ma colonie, cruautés de mr l’abbé Terray, ma détestable santé &c. &c. &c. &c. tout cela m’a empêché de vous écrire.
Je ne vous parle point des caprices du maître des jeux. Il y a de petites malices qui me confondent.

Je vous envoie par mr Sabatier, qui n’est point l’abbé Sabatier, la première partie des affaires des bracmanes et de Lalli, en attendant la seconde, en attendant tout le reste.

Si vous voulez que, pour ranimer vos bontés je vous parle de comédie, je vous dirai que j’ai vu trois comédiens auxquels il manque peu de chose pour devenir excellents, mais les maîtres des jeux ne les prendront pas.

Adieu, mon cher ange, croirait on que dans ma profonde retraite je n’ai pas un seul moment à moi? Mais vous savez, mes deux anges, si mon cœur est à vous.

V.