à Paris ce 26 Juin 1771
J’ay reçu, Monsieur, avec la lettre que vous m’avés Ecrite le per de ce mois le Mémoire que vous m’avés adressé et par lequel, après avoir exposé que les Employés de la Régie du droit sur les Cuirs aportent des obstacles au succès de la Tannerie qui s’est Etablie sous vos yeux et par vos soins à Ferney, vous demandés que l’on accorde à cette manufacture toute la protection qui lui est nécessaire pour se soutenir et se procurer les accroissements dont elle est susceptible.
L’Empressement que J’aurai toujours de seconder des vües aussi utiles et aussi intéressantes que celles dont vous me faites part, m’a fait demander aux Régisseurs les Eclaircissemens qui m’étoient nécessaires sur les difficultés que les Nés Brun et Perrachon pouvoient avoir Eprouvées de la part des Employés. Ils m’ont assuré qu’il n’en étoit venu aucune à leur connoissance si ce n’est que leur Conteur ambulant ayant trouvé chez le Né Perrachon des cuirs et peaux en verd dont il tenoit magasin, il avoit fait connoitre à ce particulier que ces sortes de magasins étoient expressément prohibés dans l’Etendüe des 4 lieües frontières de l’Etranger dont Ferney n’est Eloigné que d’une demie lieüe, par l’art 26 des Lettres patentes du 29 may 1766 portant Réglement sur la Régie et perception du droit sur les cuirs, mais que par Egard pour vous, Monsieur, il n’en en avoit point fait la saisie, et Je ne peux vous dissimuler qu’au moyen de la disposition précise des lettres patentes que Je viens de rapeller, et attendu les Inconvénients de tous genres qui ne manqueroient pas de résulter de la liberté qui seroit accordée de tenir des magasins de cuirs verds à proximité de l’Etranger et qui faciliteroit la sortie de ces matières 1ères en exemption des droits et au préjudice de la main d’oeuvre nationale, c’est tout ce qu’il étoit possible de faire en faveur du Né Perrachon.
Les Régisseurs sur ce que Je leur ai fait connoitre le désir que J’avois qu’il fût formé des arrangements qui pussent se concilier avec la sûreté de la perception et du recouvrement du droit, se proposent d’établir dans le lieu même de Ferney un Bureau, et d’y faire remettre les marteaux nécessaires, afin d’éviter aux Nés Brun et Perrachon l’embarras d’aller faire dans un Bureau éloigne les déclarations auxquelles ils sont tenus, et le désagrément d’attendre pour la marque des marchandises qu’ils fabriqueront, l’arrivée des commis du Département dont la résidence ne laisse pas d’être Eloignée de Ferney; au moyen de ces facilités et de l’exactitude que Je ne doute nullement que ces fabricans n’aportent dans les déclarations qu’ils feront, Je ne vois rien qui puisse s’opposer au succès d’un Etablissement aussi avantageux, et Je vous prie d’être bien persuadé que Je m’empresserai toujours d’y concourir.
J’ay l’honneur d’être avec un parfait attachement, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur
Terray