1769-08-10, de Marie Louise Denis à Voltaire [François Marie Arouet].

J'ai oublié deux choses très importantes Mon cher ami dans ma dernière lettre.
Premièrement c'est de vous dire de ne pas perdre un moment pour écrir à Mr le duc Daumond pour Pandore, et de nous avertir quand vous lui écrivez. Je vous l'ai déjà mendé dans une lettre. Les anges ne veulent point parler que cette lettre ne soit reçue par Mr Daumond. Mr de La Borde ne veut point se mettre en avant dans la crainte de déplaire à Mr Daumond, et les anges ne parlent point que vous n'aiez écrit. Vous trouverez cela comme il vous plaira, mais cela ne peut être autrement, et la nécessité n'a point de loi.

Autre affaire. Mr Elie de Baumond est venu chez moi les larmes aux yeux. Il va le mois de 7bre à Lion pour une grande affaire. De là il ira voir Geneve et dit qu'il mourrait de désespoir s'il ne vous voiait pas. Il vous a écrit pour en demender la permition. C'est le seul article de sa lettre au quel vous n'aiez pas répondu. Il a le coeur percé. Je lui ai dit que je ne doutais pas que vous ne l'ussiez oublié. Il m'a prié en grâce de vous en écrire. Je lui ai promis. Ou dites moi un mot pour lui dans votre première lettre ou écrivez lui car il est au désespoir et c'est un homme qui vous est attaché.

Je ne vous parlerai point aujourdui de nos Convantions par ce que j'espère qu'elle n'auront pas lieu. Je prands beaucoup de Confiance dans l'autre proget. Je vous én écris aujourdui par Mr des Franges. Ma lettre sera longue. Voilà pourquoi celle ci est si courte. Des Franges part demain. Vous aurez la lettre qu'il vous portera près qu'aussi tos que celle ci. Mais écrivez à Mr Daumond, et Mr Helie de Baumond. Adieu Mon cher ami. Je vous embrasse et vous aime tendrement. Soi[ez] sûr que vous n'aurez jamais de meilleur amie que moi.