au château de Ferney par Geneve 28e juin 1769
Monsieur,
Quoi que je n'aie point eu l'honneur de vous faire ma cour depuis trente années mon respectueux attachement pour vous n'a jamais diminué par une si longue absence.
Ma vieillesse n'a point affaibli mes sentiments. Je suis dévoué à vôtre personne et à l'auguste corps auquel vôtre illustre maison préside depuis deux siècles.
J'aprends que vous avez soutenu en dernier lieu les droits de la compagnie souveraine à la tête de laquelle vous êtes; et qu'il parait dans le monde un éxcellent mémoire qui met dans le plus grand jour toutes vos prérogatives. Je crains de prendre trop de liberté en vous supliant, Monsieur, de daigner ordonner qu'on m'en fasse part. Mais si vous aviez cette bonté je vous aurais une extrême obligation. Ce mémoire entre nécessairement dans le plan de ceux qui se consacrent comme moi à l'étude de l'histoire de France.
Si vous me fesiez cette faveur le livre me parviendrait sûrement sous vôtre contre-seing, et je vous réponds que je le lirai avec autant d'attention que de zèle. Daignez n'imputer mon importunité qu'à ce zèle que je conserverai jusqu'à la fin de ma vie.
J'ai l'honneur d'être avec un profond respect
Monsieur
Vôtre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire