1769-01-12, de Voltaire [François Marie Arouet] à Louise Honorine Crozat Du Châtel, duchesse de Choiseul.

Madame,

Je vous fais ces Lignes pour vous dire qu'en conséquence de vos ordres précis à moi intimés par Madame votre petite fille, j'ai l'honneur de vous dépêcher deux petits volumes traduits de L'anglais, du contenu desquels je ne réponds pas plus que les Etats de Hollande quand ils donnent un privilège pour imprimer la Bible.
C'est toujours sans garantir ce qu'elle contient.

Ayez La bonté, Madame, de notter que ne sachant pas si Messieurs des postes sont assez polis pour vous donner vos ports francs, j'adresse le paquet sous l'envelope de Monseigneur votre mary, pour la prospérité duquel nous faisons mille vœux dans nôtre rue. Nous en faisons autant pour vous, Madame; car tous ceux qui viennent acheter des Livres chez nous, disent que vous êtes une brave Dame qui vous connaissez mieux qu'Eux en bons livres, qui avez considérablement de l'esprit et qui ne courez jamais après. Vous avez le renom d'être fort bienfaisante, vous ne condamnez pas même les vieux barbouilleurs de papiers à mourir parce qu'ils n'en peuvent plus, et cela est d'une bien belle âme.

Enfin Madame, on dit toute sorte de bien de vous dans nôtre boutique; mais j'ay peur que cela ne vous fâche, parcequ'on ajoûte que vous n'aimez point cela. Je vous demande donc pardon, Madame, et suis avec un grand respect

Madame

Votre très humble et très obéissant serviteur

Guillemet Tipographe en la Ville de Lyon