3e juillet 1769,Lyon
Guillemet ignore si Madame La Duchesse est dans son palais de Paris, ou dans son palais de Chantelou, ou dans sa chambre de Versailles.
Quelque part où elle soit elle dit ou elle fait des choses très agréables.
Guillemet prend la liberté de lui en dépêcher qui ne sont pas peut être de ce genre. Mais comme elle est très tolérante il s'est imaginé qu'elle pourait jetter un coup d'œil sur une Tragédie où l'on dit que la Tolérance est prêchée. Monseigneur son époux le Corsique aurait-il le tems de s'amuser un moment de cette bagatelle? Guillemet en doute. Monseigneur a un nouveau roiaume et un nouveau Pape à gouverner, et force petits menus soins qui prennent vingt quatre heures aumoins dans la journée. Les détails me pilent, disait Montagne, à ce qu'on m'a raporté. Voilà pourquoi Guillemet se garde bien d'écrire à Monseigneur; mais quand nous entendons parler de ses succès dans nos climats sauvages, nôtre cœur danse de joie.
Je vais bientôt, Madame, quitter la Typographie avant que je quitte absolument la vie, selon le conseil de La Blétrie. Je suis comme l'apoticaire Arnoud qui se plaignait que l'on contrefit toujours ses sachets; celà dégoûte à la fin du métier, Les typographes comme les apoticaires; ainsi, Madame, vous vous pourvoirez, s'il vous plait, ailleurs; il faut bien que tout finisse. Il faut surtout finir cette Lettre de peur de vous ennuier. Daignez donc, Madame, agréer le profond respect qui ne finira qu'avec la vie de
Guillemet
PS: Je ne sais comment je suis avec Madame vôtre petite fille depuis un certain déjeuner. Je ne sais si elle aime encor les vers; je ne sais rien d'elle.