à Ferney 18e octobre 1768
Je vous remercie, Monsieur, des détails que vous avez eu la bonté de me donner.
J'ay ai été d'autant plus sensible que tout ce qui concerne vôtre gloire m'est confirmé de tous côtés. Vous vous êtes conduit avec autant de sagesse que de valeur. Si tout le monde suit vôtre éxemple on sera bientôt le maître absolu de la Corse. La division est déjà, dit-on, parmi ces insulaires qui préfèrent leur pauvreté et leur anarchie à un gouvernement juste et modéré qui les enrichirait.
Vous voiez sans doute souvent Mr Le Marquis De Chauvelin. Je respecte trop ses occupations pour lui écrire, mais je vous suplie d'avoir la bonté de lui dire que je m'intéresse à son succez plus qu'à celui d'une pièce de théâtre. Mon avis est que les Corses viennent lui parler, et ils seront bientôt soumis. J'aimerais mieux qu'il réussit en les persuadant qu'en les tuant, car après tout, si on les égorge tous tant qu'ils sont qui diable voudra habiter l'île? Je ne connais que des boucs et des chêvres qui voulussent s'y établir.
J'ai un bon ami parmi ceux qui s'exposent tous les jours à être canardés par les Corses, c'est le major du régiment D'Eptingen, homme de beaucoup d'esprit et excellent officier. Mais de tous ceux qui font cette rude campagne, celui à qui je suis le plus dévoué et qui a pour moi le plus de bonté, c'est vous sans contredit.
J'ai l'honneur d'être avec les plus respectueux sentiments, Monsieur, vôtre très humble et très obéissant serviteur
V….