1768-11-20, de Joseph Audra à Voltaire [François Marie Arouet].

J'ai reçu, mon vénérable patriarche, avec le respect que vous doit votre disciple et votre admirateur, votre lettre du 14.
Vous prenez mes désirs pour des ordres et vous me donnez un gros paquet de livres lorsqu'une seule feuille eût suffi pour me contenter. Recevez mes remerciements, et croyez que dans ce pays-ci le tout tournera à ma gloire et à celle de la vérité. Vous ne sauriez croire combien augmente dans cette ville le zèle des gens de bien et leur amour et leur respect pour le patriarche de la Tolérance et de la vertu. Vous savez que le colonel de mon régiment et ses majors généraux sont tous dévoués à la bonne doctrine, ils la disséminent avec circonspection et sagesse, et j'espère que dans quelques années elle fera une grande explosion. Quant au parlement et à l'ordre des avocats, presque tous ceux qui sont au dessous de l'âge de trente cinq ans sont pleins de zèle et de lumière, et il ne manque pas de gens instruits parmi les personnes de condition.

J'ai reçu il y a un mois des nouvelles du docteur Swift. Il est toujours plein de vénération pour votre personne, mais quelque supériorité dont il puisse jouir, je prétends qu'il me cède à cet égard.

Adieu, mon vénérable patriarche, aimez toujours votre enfant.