3 7bre 1768, au château de Ferney
Je suis, mr, dans un état si triste, j'éprouve de si longues et de si cruelles maladies qui sont la suite de ma vieillesse, que je n'ai pu répondre plus tôt à la lettre dont vous m'avez honoré. C'est une grande grâce sans doute accordée par un grand roi de permettre qu'on lui érige une statue.
Je trouve l'inscription de mr le comte de Muy fort bonne et fort convenable. Je crois que si je m'avisais d'en faire une, il aurait lieu d'être mécontent. Les inscriptions d'ailleurs réussissent rarement dans notre langue. Permettez moi de vous conseiller d'employer celle de mr de Muy. Vous savez que le mieux est l'ennemi du bien; et de plus il me serait bien difficile de faire ce mieux. Les bons vers sont des coups de hasard, et à mon âge on n'est pas heureux à ce jeu là.
Comptez que ni ma vieillesse ni mes maux ne diminuent rien de l'estime respectueuse avec laquelle j'ai l'honneur d'être, mr, vôtre très humble et très obéissant serviteur.
Voltaire