9e Avril 1768, à Ferney
Monseigneur,
Au milieu des consolations que l'équité et les bontés de vôtre Altesse sérénissime me font éprouver, il me reste toujours l'amertume de voir que ni la chambre de Montbelliard, ni le sr Jeanmaire n'aient point encor mis l'affaire en règle.
Il ne s'agit que de la somme la plus modique pour terminer le passé; elle n'est que d'environ deux mille livres. Je ne demande même actuellement qu'un mot d'écrit, qu'une reconnaissance. Je suis prêt de donner une quittance générale pour le passé, et je ne demande autre chose sinon qu'on liquide mon compte; il faut que les affaires soient nettes, et qu'il n'y demeure aucun sujet de contention.
Je vous suplie, Monseigneur, de donner un ordre positif pour que le passé soit liquidé. Il est bien étrange qu'il ne le soit pas. C'est l'intérêt de Vôtre Altesse sérénissime comme le mien. Jamais ni la chambre des finances, ni Mr Jeanmaire ne m'ont répondu un mot sur cet article important.
Je supose que vous êtes si bien servi dans les grandes affaires que l'on néglige les petites; mais quand on a l'honneur de vous servir on ne doit rien négliger. Daignez, encor une fois, ordonner qu'on liquide le passé, afin qu'il ne reste jamais la moindre difficulté. Je suis toujours honteux de vous importuner de ces bagatelles. Mais à mon âge je ne dois rien laisser à discuter à ma famille, et d'ailleurs c'est une nouvelle occasion pour moi de vous renouveller ma reconnaissance et le profond respect avec lequel j'ai l'honneur d'être
Monseigneur
De Vôtre Altesse Sérénissime
Le très humble et très obéissant serviteur
Voltaire