10 auguste 1767
Je viens de trouver enfin, mon cher ami, un premier volume de Corneille pour l'ami Thiriot.
Comment veut il que je le lui envoie? Cela fait un très gros paquet, qui serait refusé à la poste.
Je crois qu'il faut laisser imprimer le mémoire qui devait précéder la nouvelle édition du Siècle de Louis 14. C'est une affaire qui n'est pas seulement littéraire; elle est personnelle à plusieurs grandes maisons du royaume qui m'ont témoigné leur indignation contre ce malheureux la Beaumelle. Ses calomnies peu connues peut-être à Paris, sont répandues dans les pays étrangers. Il m'a traité comme Louis 14, et je ne suis pas roi. Un pauvre particulier doit être défendu; il doit décrier au moins le témoignage de son ennemi. Je ne reviens point de mon étonnement quand mes amis me disent qu'il faut mépriser de telles impostures. Je n'entends pas quel honneur il y a à se laisser diffamer, et je suis bien persuadé qu'aucun de ceux qui me disent gardez le silence, ne le garderait à ma place.
Je crains toujours que le mémoire de Louiseau ne déplaise au ministère. La satire contre le gouvernement de Berne est un peu violente. Le mémoire n'est point juridique. Si messieurs de Berne se plaignent, on pourra s'en prendre à Loiseau.
Je ne sais plus comment va l'affaire de m. de Beaumont. Adieu, mon cher ami; faites parvenir ce billet à Protagoras. Pour Platon, il m'abandonne aussi bien que la cause commune. Je vous embrasse de tout mon cœur.