1767-06-25, de David Lavaysse à Voltaire [François Marie Arouet].

J'avais vu dans quelqu'une des lettres que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire, que vous aviez encore le cœur ulcéré contre m. de La Beaumelle. Je n'ai jamais su en quoi il vous avait manqué; mais ce que je sais bien, c'est que depuis qu'il est marié à une de mes filles, toutes les fois que j'ai eu l'occasion de le voir et qu'il a été question de vous, monsieur, et de tout ce que vous faites pour le bonheur du genre humain, il a applaudi à toutes les louanges qu'on vous donnait et qui vous sont dues à tant de titres….

Ma fille me marque qu'ayant ouvert un paquet adressé à son mari qui depuis longtemps est malade, elle y a trouvé une lettre imprimée, au public en votre nom, dans laquelle son mari est accusé d'être un prédicant, un voleur, etc. Je suis convaincu, monsieur, que la main ennemie de laquelle sont parties les lettres faussement attribuées à m. de La Beaumelle a tracé celle qui vient de paraître sous votre nom….Je ne vous ferai pas l'injure de croire que, quelle que puisse être votre animosité contre lui, vous vous fussiez permis de pareilles invectives. Une foule de faiseurs de libelles qui ne vivent que de leurs calomnies n'écrivent que pour tâcher de flétrir les auteurs qui ont mérité l'estime publique. Ce sont là, monsieur, vos vrais ennemis; c'est des noires vapeurs de leur cerveau que sont sorties les lettres contre vous et celle qui vient de paraître contre m. de La Beaumelle….

Ma fille, j'ose le dire, a quelque mérite: elle vous honore infiniment. Elle est à peu près témoin de tout ce que son mari écrit; et sûrement si, depuis leur mariage, il avait voulu écrire contre vous, elle aurait arrêté sa plume. Vous pouvez l'en croire sur tout ce qu'elle vous a marqué dans sa lettre.