1765-05-29, de Voltaire [François Marie Arouet] à Carlo Goldoni.

Je n'ai reçu, Monsieur, le paquet et la Lettre dont vous m'avez honoré, que depuis deux jours, à mon retour des bains de Suisse, où j'avais été obligé d'aller pour ma très mauvaise santé, et pour des fluxions sur les yeux que je dois au voisinage des alpes.
Vous vous doutez bien que je fais tous mes éfforts pour recouvrer la vue quand j'ai vos ouvrages à lire. Je sens bien que je serai privé de la consolation de vous posséder dans ma retraitte suisse, mais je préfère vôtre bonheur à mon plaisir. Vous voilà attaché à une grande princesse qui sentira tout vôtre mérite. Il est connu par tout, mais il sera récompensé en France. Le théâtre aura fait vôtre réputation, et vos mœurs aimables contribueront à vôtre fortune.

Comptez, Monsieur, sur les sentiments qui m'attacheront à vous tant que je vivrai. Je sais trop combien vôtre personne est digne de vos ouvrages pour ne pas vous aimer tendrement.

V.