à Paris ce 21 février 1765
Je suis, monsieur, très reconnaissant et bien plus flatté que je ne puis vous l'exprimer de la lettre obligeante que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire à Soleurre et qui m'a été renvoyée ici.
Dans tout ce que j'ai pu dire de vous, monsieur, je n'ai fait que vous rendre la justice que toute l'Europe vous rend et qu'un Français doit plus particulièrement à monsieur de Voltaire, qui honore son siècle et sa nation. Je n'ai pas l'honneur d'être connu de vous, mais j'ai souvent lu de vos ouvrages et toujours avec plaisir et avec admiration, indépendamment du génie et du talent supérieur qui caractérisent vos ouvrages, dont il ne m'appartient pas de parler; j'ai trouvé qu'ils tendent tous à rendre les hommes honnêtes, vertueux, meilleurs et plus heureux; voilà ce que je n'ai cessé de dire et ce que je répète toujours avec la même satisfaction parce que je le sens.
Je suis bien glorieux, monsieur, que mon petit discours aux Suisses ait pu vous plaire; je le croirai bon puisqu'il a mérité votre approbation. Un suffrage comme le vôtre est bien fait pour réveiller l'amour-propre et doit pour le moins autoriser ses illusions.
Que je serais heureux, monsieur, si pendant mon séjour à Soleurre je pouvais me flatter de vous y voir et de vous y posséder quelques jours, si pendant le cours de mon ministère en Suisse, je pouvais vous y être bon à quelque chose, et si dans quelque lieu que j'habite, je me trouvais à portée de vous convaincre de la vérité des sentiments d'estime, d'attachement et de reconnaissance que je vous ai voués et avec lesquels j'ai l'honneur d'être,
Monsieur,
Votre &ca.